Que dit la loi au sujet des perturbateurs endocriniens ?
Les perturbateurs endocriniens sont devenus assez récemment un problème de santé publique et la question de les interdire s’est rapidement posée. Essentiels dans la composition de nombreux produits, les perturbateurs endocriniens ne sont pas que des éléments néfastes. De plus, avant de les interdire, il est nécessaire d’apporter une définition claire et tranchée de ces substances chimiques. Dans ce but, la Commission européenne a dévoilé les critères retenus dans la définition des perturbateurs endocriniens (PE) afin de mieux réglementer ces substances. Selon elle, un perturbateur endocrinien est « une substance ou un mélange exogène, altérant les fonctions du système endocrinien et induisant de ce fait des effets néfastes sur la santé d’un organisme intact, de ses descendants ou de sous-populations ».
Mais cette définition a provoqué un soulèvement au sein des ONG. D’une part, car les études exigées requiert un niveau de preuve très élevé, souvent impossible à atteindre et d’autre part, doivent mettre en cause un seul perturbateur endocrinien et ce, sur une durée assez limitée. Or, nous savons que ces substances agissent sur le long terme à très faible dose et que l’effet cocktail empêche l’incrimination directe d’un perturbateur en particulier.
La grande souplesse des lois en vigueur s’explique par la pression exercée par les industriels sur le rang politique. En effet, les entreprises poussent à repousser les interdictions ou à obtenir des dérogations pour continuer la fabrication de leur produit en prétextant que les preuves ne sont pas suffisantes. Il est clair que l’investissement dans la recherche et le développement de nouvelles substances plus fiables leur coûterait beaucoup. De plus, le risque est toujours que la nouvelle molécule identifiée comme sans danger et tout aussi efficace que la précédente présenterait à long terme tout autant voire davantage de problèmes.
Législation du bisphénol A:
En France, la Loi n° 2010-729 du 30 juin 2010 interdit l’importation et la mise sur le marché (à titre gratuit ou onéreux) de tout conditionnement, contenant ou ustensile, comportant du bisphénol A et destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires pour les nourrissons et enfants en bas âge.
Cette loi a ensuite été complétée par la loi n°2012-1442 du 24 décembre 2012 qui interdit la fabrication, l’importation, l’exportation et la mise en marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A.
L’effet cocktail c’est quoi ?
Des substances chimiques, qui prises isolément, sont sans danger pour l’Homme, peuvent devenir nocives lorsqu’elles sont mélangées.
Nous sommes quotidiennement exposés à de multiples composés exogènes tels que des polluants environnementaux, des médicaments ou des substances provenant de notre alimentation. Certaines de ces molécules, appelées perturbateurs endocriniens, sont fortement suspectées d’interagir inopportunément avec des protéines régulatrices de nos cellules et d’induire de nombreux troubles physiologiques ou métaboliques (cancers, obésité, diabète, …). Par ailleurs, la combinaison de ces molécules dans les mélanges complexes avec lesquels nous sommes généralement en contact pourrait exacerber leur toxicité.
Les chercheurs dévoilent un mécanisme qui pourrait contribuer à cet effet de mélange. Ils montrent que certains estrogènes comme l’éthinylestradiol (un des composants actifs des pilules contraceptives) et des pesticides organochlorés tels que le trans-nonachlor, bien que très faiblement actifs par eux-mêmes, ont la capacité de se fixer simultanément à un récepteur situé dans le noyau des cellules et de l’activer de façon synergique.
Les analyses à l’échelle moléculaire indiquent que les deux composés se lient coopérativement au récepteur, c’est-à-dire que la fixation du premier favorise la liaison du second.
Cette coopérativité est due à de fortes interactions au niveau du site de liaison du récepteur, de sorte que le mélange binaire induit un effet toxique à des concentrations largement plus faibles que les molécules individuelles.
Ces résultats obtenus in vitro constituent une preuve de concept qui ouvre la voie à un large champ d’études. Il existe effectivement dans notre environnement environ 150 000 composés dont l’action combinée pourrait avoir des effets inattendus sur la santé humaine au regard de leur innocuité reconnue ou supposée en tant que substances isolées.
Séparément, l’éthinylestradiol (EE2) et le trans-nonachlor (TNC) se lient seulement à forte concentration au récepteur des xénobiotiques (PXR) et sont des activateurs faibles de ce récepteur. Lorsqu’ils sont utilisés ensemble, les deux composés se stabilisent mutuellement dans la poche de liaison du récepteur. Le « ligand supramoléculaire » ainsi créé possède une affinité augmentée pour PXR, de sorte qu’il est capable d’induire un effet toxique à des doses auxquelles chaque composé est inactif individuellement.